Armand partit, Rose soupira. Il était toujours aussi arrogant, vaniteux, et désinvolte. Mais c’était ce qu’elle aimait chez lui. A chaque fois qu’elle le voyait, elle en avait les frissons. Tant de virilité, tant de charisme chez un homme…c’était un démon. Un démon de la tentation.
Elle vérifia sa coiffure, lissa sa robe au décolleté incroyablement échancré, et entreprit d’aller voir la jeune femme délaissée par Armand. Pleurs, colère, dépression, incompréhension…voilà ce qui l’attendait.
Elle monta les marches du premiers étage, traversa le corridor ou tout le monde la laissa passer, soit par crainte, soit par respect, puis elle monta dans ses appartements.
Cela sentait le renfermé la-dedans. Le renfermé, et l’après-amour. Sans cérémonie, elle alla ouvrir les fenêtre, ne jetant pas un regard sur la jeune femme qui cousait dans le coin. Rose s’arrêta, admira la vue de paris, tous ces toits, toutes ces cheminées, ces ruelles tortueuses, ces gens affairés.
« Il ne reviendra pas », déclara t-elle durement sans regarder Solange. « Tu as été son jouet le temps d’un instant, mais il ne reviendra pas. Il est comme un enfant, il veut tout tout de suite, et il délaisse tout dès qu’il a eut ce qu’il voulait. Il est ainsi. Tu le croiseras sûrement si tu restes au Moulin, mais il ne te regardera même pas. Pour lui, tu as cessé d’exister, alors inutile de t’effondrer en larme, je ne tien pas à avoir une couturière qui se lamente à longueur de temps. »Elle marqua une pause, et se dirigea vers Solange.
« Tu es douée, je te l’ai dit. Je veux bien t’engager. Tu logeras ici, tu mangeras ici, tu fera tout ici. Je ne t’oblige pas à l’exclusivité, tu peux continuer à coudre pour d’autres si tel est ton désir. Seulement…seulement, tes plus belles pièces seront pour moi, je ne tien pas à ce que d’autre femme soient mieux habillées que moi. Tu seras payée 8 franc la semaine, mais si ton travail me plait, tu seras augmentée. »
Rose se pencha pour regarder le travail de Solange.
« Cette robe manque d’attrait" , déclara t-elle. "Mes gens t’apporteront plus de tissus, tu n’as qu’à demander, et tu seras servie. »